Depuis 1872, il est interdit en France, dans les enquêtes de statistique publique, d’interroger les personnes sur leur appartenance publique. En 2005, l’INED a néanmoins obtenu une dérogation exceptionnelle de la CNIL pour pouvoir poser la question : « Quelle est votre religion d’appartenance (ou d’origine) ? ». L’enquête porta sur quelque 10.000 personnes.
Rappelons les chiffres relatifs à l’islam : l’enquête estime qu’un peu plus de 2 millions de personnes vivant en France se déclarent musulmans. Si on précise qu’il s’agit d’une enquête statistique (dont les résultats sont fondés sur des estimations) et non d’un recensement, que l’enquête n’a porté que sur les personnes de 18 ans et plus et qu’il était possible de se déclarer « sans religion » (5 millions), on admettra le caractère très approximatif de ce chiffre de « un peu plus de 2 millions de musulmans en France ». D’autres chiffres officiels, non issus d’une enquête statistique, parlent de 5 millions de personnes d’« origine culturelle musulmane » vivant en France.
Malgré son caractère approximatif, ce chiffre place la religion musulmane au deuxième rang des religions professées en France. L’Islam arrive même en tête, proportionnellement, des religions pratiquées en France puisque « 34 % des hommes se déclarant musulmans se rendent plus de deux fois par mois sur leur lieu de culte, contre seulement 4 % des catholiques ; chez les femmes en revanche, l’écart est moindre : 14 % des musulmanes s’y rendent au moins deux fois par mois contre 8 % des catholiques. » Et on atteint des chiffres de 70-80 % pour la pratique du ramadan chez les musulmans vivant en France.
Le nombre des lieux de culte musulman est, lui, en progression très rapide : 500 mosquées en 1985, 1.200 en 1992, 1.600 en 2004, 2.000 en 2007. Encore ne s’agit-il que des lieux de culte répertoriés, chiffres qui laissent de côté les lieux de culte « sauvages » ou improvisés. Les Turcs, particulièrement bien organisés, sont en passe de devenir « la première communauté propriétaire de lieux de culte musulman en France » (Didier Leschi, dans l’ouvrage collectif Les lieux de culte en France. 1905-2008, Lethiellleux, 2008, p. 24).
Dans un entretien publié récemment dans la revue américaine Angelus, Mgr Tissier de Mallerais répond à la question : « Que voyez-vous dans les 20 ans qui viennent ? » : « En Europe, des républiques islamiques en France, en Grande-Bretagne, en Belgique et aux Pays-Bas ». La prospective est effrayante. Mais elle nous semble avoir déjà été faite il y a vingt ans…
Il y a vingt ans aussi, ou presque, que le P. Maurice Avril, qui s’est dévoué aux harkis (la plupart musulmans), a appelé à une XIIe croisade (livre paru en 1990). Croisade non pas pour bouter les musulmans hors de France mais pour essayer de les convertir à la religion chrétienne. Le livre est paru sans susciter d’écho ni dans les structures hiérarchiques de l’Eglise de France, ni dans la Fraternité Saint-Pie X. Encore récemment, un livre publié par un prêtre de la FSSPX pour proposer « une réflexion authentiquement chrétienne » sur l’immigration développait des analyses subtiles et lucides d’ordre politique, mais n’évoquait nullement la nécessaire évangélisation.
Depuis 2007 existe à Toulon, officiellement instituée par l’évêque du diocèse, une Société missionnaire de la divine miséricorde fondée par l’abbé Loiseau. La Société a inscrit dans ses statuts : « La société œuvre pour la nouvelle évangélisation. C’est pourquoi, elle promeut les processions publiques, le porte à porte, les missions de rues. Soucieux de faire connaître le Christ à tous, les Missionnaires de la Miséricorde portent plus particulièrement les musulmans dans leurs prières et n’hésitent pas à aller à leur rencontre, pour annoncer le Christ miséricordieux. »
Les immigrés présents sur le territoire français ne partiront pas tous, même avec un gouvernement soucieux d’une politique authentiquement nationale. Ils ne partiront pas tous notamment parce qu’ils sont, pour un certain nombre, déjà français. L’intégration est culturelle et sociale, mais pour un chrétien, la meilleure intégration n’est-elle pas celle qui agrège à la communauté ecclésiale ?
Yves Chiron